top of page




ree

Défendre le beau passe par des biais qui échappent à beaucoup de monde.

La fiscalité sur l’art fait partie de ces biais en garantissant un régime de retraite et de sécurité sociale aux artistes.

L’artiste est indissociable des diffuseurs d’art… que ce soit des marchants, des galeristes, des agents, des prescripteurs… des commissaires priseurs également. L’artiste pour être en lien avec son public a besoin de médiums.

Toute fois lorsque le médium est à son propre service avant de servir les artistes il se pose un problème. Les galeries traditionnelles se battent contre certains types de diffuseurs : les hôtels et les restaurants par exemple qui ont le sentiment de faire du mécénat en accrochant à leurs murs des œuvres d’art. Néanmoins loin de connaître la législation elles favorisent une distorsion entre les artistes qu’elles exposent et ceux qui tachent de vivre de leur travail. En effet : les artistes qui exposent dans ces lieux d’exposition « occasionnels » ne sont le plus souvent pas inscrits à la Maison des Artistes (qui gère leur régime de retraite et de sécurité sociale) ; de même ces adresses ne remplissent que très rarement leurs obligations et ne cotisent pour ainsi dire pas à ces mêmes caisses. Si « offrir » ses murs pour une exposition d’art, part d’un bon sentiment, les charges qui ne sont pas payées favorisent un dumping de l’art au profit d’artistes qui n’ont pas une activité viable. Ils occupent l’espace, et par la négligence des lieux d’expositions se soustraient à toute fiscalité. Il est très français de ne pas aimer payer des impôts. Pourtant chacun d’entre nous les payons et nous offusquons que certains tachent d’y échapper par n’importe quel moyen. Je n’ai de leçons à donner à personne, mais ce paradoxe français devient un syndrome dans un autre pays : la Grèce! On peut toujours chercher à payer moins cher les choses, mais qu’on ne se plaigne pas ensuite quand l’économie est cassée. Que les artistes ne se plaignent pas que la MdA soit brinquebalante, et que les diffuseurs ne se plaignent pas des redressements fiscaux.

Pour revenir à ces diffuseurs « occasionnels », ils sont très heureux de dénicher des artistes « coup-de-coeur », ils sont très heureux d’avoir leur murs décorés, ils sont aussi très heureux de toucher leur commission sur les ventes… mais pourquoi alors se défendent-ils de se considérer comme des professionnels de l’art. C’est un beau métier… mais qu’ils exigent des artistes qu’ils exposent de payer leurs charges, et qu’eux-même fassent de-même. Dans notre monde il n’y a que comme cela que l’on peut défendre la création artistique : en jouant tous le même jeu avec les mêmes règles.


Daniel Castan offre cet été à la Galerie Harmattan à Megève une vision en camaïeu de ses villes : de superbes œuvres en dégradés de gris tout juste rehaussées de quelques touches de rouge ou de jaune, ou encore des visions pourpres de rues au crépuscule. Chacune de ces oeuvres, à la fois proches et opposées montrent toute la complexité de la peinture.

Une toile n’est pas seulement une technique, ou quelques coups de pinceaux ou de couteaux vite lancés sur une toile. Une peinture est une construction mentale avant tout. Une vision préalable en couleur que l’artiste cherche à partager par le biais de son savoir-faire. Ainsi lorsque Monet déclinait ses cathédrales et ses meules de foin, les historiens de l’art y ont vu le secret désir de représenter une chose infinie : le temps. Mais peut-être, plus prosaïquement, l’artiste voulait-il offrir à notre regard une chose toute aussi infinie : la simple beauté. Celle qui change au gré des heures, se transforme et se renouvelle sans cesse !

Daniel Castan fait cela, il travaille son sujet comme quelque chose de vivant, de changeant… et tire parti d’instants fugaces, d’éclairages incertains pour mettre en valeur son sujet favoris.


Jamais je n’aurais imaginé écrire cela à propos de tableaux… et pourtant cela devient une évidence : les œuvres de Lisa G. sont des surfaces érogènes. Elles sont du plaisir ! elles sont un plaisir raffiné, mesuré, profondément intellectualisé ! toutes en retenues et toutes en poussées. En retenue car rien n’y parait lorsqu’on regarde rapidement ses toiles sans chercher à les comprendre… elles apparaissent simplement belles ; et en poussée car dès que l’on se penche dessus, tout devient évident et bouscule notre raison.

Ces toiles sont des pensées rendues physiques… des pensées à regarder, comme des bribes de vie, peut-être des vies entières. Les femmes et les jeunes filles représentées sont réfléchies, suspendues dans leur histoire. Elles sont comme des personnages d’Edgar Alan Poe déposées là, sous le vernis.

Face à une peinture, on peut imaginer que nous, spectateurs, sommes une première intégrité, et que l’œuvre en est une seconde. Que l’un comme l’autre est un être fini (et plus encore les personnages peints que nous-mêmes !) et qu’ainsi chacun contemple l’autre sans interagir.

Les œuvres de Lisa G. ne sont pas ces tautologies-là.

Pour le spectateur qui regarde avec attention les œuvres de Lisa G., une relation intime se crée, comme avec un être. L’un et l’autre sont complexes, pertinents. Un dialogue s’instille, des émotions et du plaisir surviennent. Et chaque échange nous amène plus loin dans la connaissance du personnage qui offre ses pensées à nous.

Lisa G., comme d’autres artistes, rompt avec les règles de la représentation, notamment avec celles de la perspective. Mais ici, la singularité de cette rupture de la perspective n’est pas picturale, mais psychologique, comme elle pourrait l’être de l’oeuvre de Francis Bacon. Les peintures ne sont pas juste belles ou décoratives, ou puissantes ou encore angoissantes. Elles sont une offrande, des pensées à regarder… ou mieux : des sentiments à regarder. Cette transgression-là est plus forte qu’une composition, plus forte que de la matière ou une teinte apropriée. L’émotion, la connivence pressque, qui est créée avec le spectateur rend cette peinture exceptionnellement présente, exceptionnellement tactile et donc érogène.

bottom of page